pierre pasquini
 
 
 
Ecole privée et impensé des “patois” au XIXe siècle. L’exemple des Présentines en Provence

 
Si pour l’école publique le français est la langue de la nation et les patois au mieux un archaïsme, au pire une entrave à l’éducation, la relation entre les deux n’est pas foncièrement différente dans la pratique des écoles privées. Il semble en effet qu’elles pratiquent souvent, et parfois de façon aussi directive le partage des langues en faveur du français et, au moins dans les intentions, la volonté d’interdire les parlers locaux hors de leurs manifestations symboliques. Il convient donc de s’interroger sur la réalité de ces pratiques et l’idéologie qui les sous-tend. Elles pourraient amener à revoir le rapport « langue des messieurs »/ »langue de l’Etat », et la réticence de l’école publique envers les parlers locaux. Outre les raisons historiquement connues, il s’agit aussi d’une stratégie tournée vers la concurrence d’un système privé dans lequel les choix linguistiques n’étaient pas théorisés politiquement mais produisaient une relation difficile à renverser, voire à faire évoluer. L’école publique, en somme, n’invente pas l’unification linguistique. Elle accompagne en revanche cette unification d’une idéologie liée à l’institution de la République, dans laquelle le peuple ne peut parler que français. Autant qu’une nouveauté, c’est une étape dans un processus dans lequel l’école républicaine joue un rôle important mais peut-être pas aussi décisif qu’on le dit parfois. Cette hypothèse sera examinée à partir de l’exemple de l’ordre des Présentines, dont l’influence est importante en Provence (et au delà) au XIX° siècle.