pascal ottavi
 
 
 
La question des langues régionales : un isolat idéologique ?


La contribution que je souhaite soumettre au débat s’inscrit pleinement dans le cadre du second thème d’étude et de réflexion proposé à l’occasion du présent colloque : « il s’agit d’analyser comment la question de la langue à/de l’école renvoie à des problématiques –sociales, idéologiques, culturelles, bien plus générales ». 
Vue de l’extérieur, la question des langues régionales semble affaire au mieux de spécialistes, de militants, au pire de nostalgiques passéistes et ombrageux. N’occupant pas le devant de la scène intellectuelle, elle paraît non seulement n’affecter qu’une frange marginale de l’opinion mais encore se situer aux marges même de la modernité, si ce n’est en deçà de celle-ci. A ce titre, on peut logiquement se demander si elle ne constitue pas une sorte d’isolat idéologique dont la connaissance et l’intérêt relèveraient exclusivement du débat d’initié. 
Il me semble possible de répondre par la négative et cela sans grande hésitation : de l’avènement de la IIIe République aux tentatives actuelles d’unification européenne, la question des langues régionales épouse avec plus ou moins d’intensité les problématiques dont débattent les hommes dans l’espace et le temps où ils se meuvent. Ces problématiques peuvent relever de préoccupations diverses : elles peuvent être de nature politique, avec, dans le cas qui nous occupe, la question de la décentralisation, de la Révolution à nos jours, celle des minorités linguistiques, il peut s’agir encore de débats de nature épistémologique tels que la contestation de la grille de lecture de la modernité au moyen des savoirs positivistes de l’école républicaine ou encore les justifications multiples d’un recours à l’apprentissage précoce des langues. 
On pourra constater ainsi que ce qui pose problème n’est pas tant l’ancrage irréfutable de la question des langues régionales dans l’ensemble des débats relatifs à la vie en société, mais plutôt la difficulté qu’il y a à la faire partager à un vaste public, problème qui se pose sans doute moins en Corse que dans d’autres régions.
Università di Corsica